Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
14 mars 2013 4 14 /03 /mars /2013 08:52

Audincourt. Blessés par Flash-Ball : Pierre, Joachim, Ayoub et les autres

Joachim Gatti et Pierre Douillard ont perdu un œil après avoir reçu un tir de Flash-Ball. Comme Ayoub Bouthara à Audincourt. Les similitudes vont plus loin…

http://juralib.noblogs.org/files/2013/03/0115.jpg

Joachim et Pierre (de dos), qui ont vécu le même drame que le jeune Ayoub à Audincourt, sont venus témoigner.

« Jour J + 2 ans et… RAS. La justice n’avance pas ». Odile Banet, membre du comité « Justice pour Ayoub », constate et déplore les faits. Le 7 février 2011, le jeune lycéen était atteint d’un tir de Flash-Ball qui touchait son globe oculaire alors qu’il se trouvait en marge d’une rixe à Audincourt. Deux ans après, la victime, qui a du mal à se reconstruire, attend toujours que le policier qui se trouvait derrière l’arme réponde de son geste devant le tribunal.

C’est une arme utilisée pour casser du manifestant, pour terroriser

Joachim Gatti et Pierre Douillard ont connu pareil sort. Le premier lors d’une manifestation à Montreuil, le 8 juillet 2009, le second à Nantes, le 27 novembre 2007. Eux aussi ont perdu un œil dans l’histoire et eux aussi attendent que la justice apporte des réponses et sanctionne les responsables de leurs infirmités permanentes.

Hier, ces deux victimes étaient présentes à Montbéliard pour témoigner de leur vécu. « Mon affaire a été très médiatisée au départ. Dans un premier temps, trois policiers ont été mis en examen, mais depuis un an et demi l’instruction n’avance plus », déplore Joachim, s’interrogeant sur des délais étrangement longs.

Pour Pierre, le parcours a été différent. « Nous avons dû constituer un groupe de travail qui a mené une enquête indépendante en collectant des vidéos, des photos, etc. Grâce à cette enquête, on est parvenu à identifier le policier qui m’avait tiré dessus et il a finalement été mis en examen. Mais au procès, il a été relaxé au prétexte qu’il avait obéi à un ordre ».

Le jeune Nantais fait part de son sentiment « d’impunité policière dans ce pays ». « Et il faut arrêter de parler de bavure. Une bavure, c’est un cas isolé. Or ces cas se multiplient… »

Joachim abonde, citant ce chiffre : « En 2011, 2787 tirs de Flash-Ball ont été recensés. La législation dit que les tirs doivent être effectués au niveau du buste. Ni au-dessus, ni dans le triangle génital. Nos exemples et d’autres démontrent que ce n’est pas le cas ».

Des accidents récurrents qui conduisent le comité à vouloir « mettre sur la table le débat sur l’utilisation du Flash-Ball », poursuit Odile Banet. Utopique ? « Il faut être clair, c’est une arme utilisée pour casser du manifestant. Pour terroriser ! », s’emporte Gérard Deneux, des Amis de l’émancipation sociale.

Les membres du comité entendent poursuivre la médiatisation pour que l’affaire ne tombe ni dans l’oubli ni dans les oubliettes de la justice. Joachim Gatti, Pierre Douillard ne sont guère optimistes, mais ils continuent à se battre. Et militent pour que les victimes s’organisent afin que leurs voix groupées aient plus de chance de porter que des actions isolées. Une union face à un immobilisme qui semble être un dénominateur commun à ces mutilants tirs de Flash-Ball.

Leur presse (Sam Bonjean, LePays.fr, 10 mars 2013)

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION
14 mars 2013 4 14 /03 /mars /2013 08:51

Sécurité – Le premier plan de vidéoprotection voulu par la Ville
Les caméras arrivent

Elles avaient été annoncées pour la fin de l’année 2012 mais on les attend toujours. Les 24 caméras de vidéoprotection, dont le principe a été voté par le conseil municipal il y a un an, vont néanmoins bientôt être une réalité. Au plus tôt en mai prochain, au plus tard en juillet. Il s’agira du premier vrai plan de vidéoprotection de la municipalité qui a longtemps rechigné à poser ses yeux électroniques dans ses rues.

Les 24 caméras seront placées dans des lieux sensibles de la ville. Sept seront dans la Boucle, sept à Battant, cinq à Planoise et cinq à La Grette. Une modification par rapport au plan originel qui prévoyait seulement cinq caméras respectivement à Planoise et La Grette.

Le coût du projet est d’un million d’euros environ.

Un centre de supervision

« Ces lieux ont été choisis à partir d’un seuil de vingt faits délictueux dans l’année. Des faits qui peuvent être combattus par la présence de caméras. Ces 24 lieux devraient être confirmés vendredi prochain par la préfecture », précisait hier Franck Desgeorges, le patron de la police municipale bisontine.

Après ce passage devant la commission départementale de vidéoprotection présidée par un magistrat, il sera temps de lancer les appels d’offres pour choisir l’entreprise qui prendra en charge le marché de l’installation et de la connexion des caméras.

Au fait, à quoi vont-elles être connectées ces caméras et surtout, qui va les regarder ? « À l’origine, nous avions prévu d’installer le centre de supervision urbaine au niveau du parking beaux-arts mais il sera finalement dans le bâtiment des services municipaux, avenue Clemenceau », précise Frédéric Allemann, conseiller municipal chargé de la tranquillité publique.

Quatre postes vont être créés pour l’occasion. Quatre salariés dont le métier sera de regarder les petits écrans mais aussi de gérer les demandes de la police en cas de problèmes sur la voie publique. Le chef d’équipe sera issu de la police municipale, mais pas les trois autres employés.

Avec ces effectifs, pas question d’imaginer une supervision 24 heures sur 24 et en direct. « Ils travailleront aux horaires de jour. Mais tout sera, bien sûr, enregistré et utilisé sur réquisition », souligne Frank Desgeorges. « Les caméras privées, qui filment des lieux privés comme des commerces ou des banques, ont l’obligation de ne pas englober la voie publique. Ici, c’est le contraire, on filme la voie publique mais des logiciels feront en sorte qu’on ne voit pas les parties privées. »

Alors qu’elles ne sont même pas installées, certains se demandent si les 24 caméras sont suffisantes. « Il n’y a pas de règle, note Frédéric Allemann. Nous avons déjà des demandes pour en installer ailleurs. »

Publié par des larbins de la maison Poulaga (Philippe Sauter, EstRepublicain.fr, 13 mars 2013)

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION
13 mars 2013 3 13 /03 /mars /2013 08:50

Deux Tunisiens en prison pour une chanson

Deux jeunes Tunisiens, un homme et une femme, ont été placés en détention pour injures et menaces envers les forces de l’ordre après la diffusion sur internet d’un clip vidéo de rap s’attaquant à la police, a annoncé aujourd’hui le ministère de l’Intérieur. Le ministère précise dans un communiqué que « le clip de rap diffusé sur youtube et intitulé “les policiers sont des chiens” contient des expressions et gestes contraires à la morale, injurieux et menaçants envers les agents de la sécurité et les magistrats ».

« Une enquête policière a permis d’identifier les participants à la préparation et à la diffusion du clip, leur nombre est de huit. Dimanche 10 mars, deux d’entre eux, un jeune homme et une jeune fille, ont été arrêtés et placés en détention », poursuit la même source. Selon des médias tunisiens, les deux personnes sont le cadreur et une actrice du clip. Le rappeur tunisien Weld El 15 est recherché. Dans ce clip le chanteur dit notamment : « Policiers, magistrats je suis venu pour vous dire une seule chose, vous êtes des chiens », « Je vais égorger un policier à la place du mouton » et encore « Donne-moi un revolver, je vais tirer sur eux ».

Le communiqué du ministère de l’Intérieur ne précise pas la nature exacte des accusations visant ces jeunes, mais le code pénal tunisien prévoit des peines de un à deux ans de prison en cas de « paroles, gestes ou menaces » contre des fonctionnaires. Des artistes tunisiens dénoncent régulièrement des pressions policières et accusent le gouvernement, dominé par les islamistes d’Ennahda, de vouloir juguler la liberté d’expression en invoquant des « atteintes à la morale » ou « au sacré ».

Publié par le savoir-faire français (Agence Faut Payer, 12 mars 2013)

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION
11 mars 2013 1 11 /03 /mars /2013 11:32

Une répression géolocalisée
 

Article paru dans le Combat Syndicaliste de février 2013, toujours disponible auprès de la CNT Nantes.

Contre les opposants au projet d’aéroport, la justice sort systématiquement des mesures d’interdiction de séjour

Il faut bien parler en termes militaires puisque ce sont les gendarmes mobiles qui sont à la manœuvre : si l’opération César visant à “nettoyer” la zone des ses occupants, avait comme consigne de minimiser les blessés et les prisonniers, l’échec de l’offensive a revu les objectifs. Quelques semaines plus tard, onze gendarmes se sont infiltrés en civil, encagoulés, groupés, sur une barricade en plein dans le bocage, pour pousser à l’affrontement avec leurs collègues. Ils ont provoqué ainsi un flagrant délit leur permettant trois arrestations, en dévoilant vaguement, après coup, une petite plaque d’identification qu’il avaient autour du cou. Au passage, ils ont sommé les journalistes de ne pas les filmer, prétextant qu’un texte de loi interdisait de diffuser des images des policiers ou gendarmes infiltrés. Cette demande ne repose sur un texte légal que s’il appartenaient au peloton d’intervention de la gendarmerie, un genre de sous-GIGN qui intervient parfois en civil. L’ensemble des journalistes présents, sauf une photographe pigiste, s’est autocensuré, arrêtant les caméras. La diffusion par cette pigiste des photos de ces pandores en civil, têtes baissées (donc non reconnaissables), menottant un militant à terre, a obligé la préfecture à admettre que les faits s’étaient bien passés comme ça.

Interdit de séjour

La phase judiciaire de la répression a pris une tournure particulière en assortissant les peines de taule d’”interdictions de paraître” (l’interdiction de séjour habituelle pour les truands, étendue aux maris violents, très inhabituelle contre les militants de mouvements sociaux). C’est comme ça pour les procès de militants anti aéroport depuis quelques années, pour entartage d’un élu, pour dispersion d’échantillons de terre provenant de sondages et carottages de terrain. Interpellé par les gendarmes infiltrés, Cyril, un des derniers condamnés a écopé de 5 mois ferme et autant avec sursis, avec une interdiction de paraitre dans le département, sauf dans la petite commune où il habite. Son boulot étant tailleur de pierre, autant dire qu’il a aussi été condamné de fait à une interdiction de travailler. L’appel a été fait mais il n’y a pas de date d’audience. Possible qu’on lui accorde cette deuxième chance une fois qu’il aura purgé presque toute sa peine.

Interdiction de manifester

Question délire judiciaire, on a même eu au printemps une réquisition du proc’ à Saint-Nazaire demandant une interdiction de manifester durant un an sur le site de l’aréoport pour sanctionner le paysan Sylvain Fresneau, expropriable sous six mois. On lui reprochait d’avoir manœuvré son tracteur face à un cordon de robocops, ce qui faisait du tracteur une “arme par destination”. Plus précisément le “fait de violences contre les gendarmes avec usage ou menace d’une arme, en l’espèce un tracteur”. Il n’y avait eu ni blessé ni même contact. Là aussi, dans les mouvements paysans, la saisie d’un outil de travail par la justice, c’est du jamais vu. Le tracteur ne lui a été rendu qu’un bon mois après. Il n’a finalement écopé que d’un mois avec sursis. C’est cher payé pour avoir reculé son tracteur. Quant à l’interdiction de manifester, [elle] n’a pas été suivie dans le jugement. On voit mal comment on aurait pu l’appliquer puisque cette mesure aurait été anti constitutionnelle. À moins d’avoir un recours acrobatique à la ressucée de la sinistre loi anti casseurs des années 70s, qui peut désormais criminaliser des participations à des attroupements illicites. Il s’agit de la « loi sur les violences en bande », officiellement « loi n° 2010-201 du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public », adoptée par le Parlement en juin 2009, et entérinée par le Sénat en février 2010. Un héritage de Sarkozy qui est donc parfaitement en vigueur, et qui a créé le délit de participation à une « bande violente », passible d’un an de taule et jusqu’à 15’000 euros d’amende. Ce nouveau délit de l’attirail répressif est différent des qualifications pénales pré-existantes et maintenues, association de malfaiteurs, bande organisée. La social-démocratie n’a jamais parlé d’abroger cette atteinte aux libertés. Au contraire, elle l’utilise à qui mieux mieux contre les militants. Le changement quoi ?

Nico, Interco Nantes

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION
7 mars 2013 4 07 /03 /mars /2013 11:30

Affaire Tarnac : le forgeron normand Charles Torres relaxé à Rouen

Il a été poursuivi pour avoir refusé de se soumettre à des tests ADN. Pour son avocate, ce jugement “est une forme de critique” à l’égard de la police.

Charles Torres, l’un des suspects dans l’affaire des sabotages de caténaires de la SNCF en 2008, attribués au groupe de Tarnac, a été relaxé mercredi de son refus de se soumettre à des tests ADN, a-t-on appris auprès de maître Marie Dosé, l’une de ses avocats. L’homme avait été placé en garde à vue en février 2012 dans le cadre de l’enquête menée par l’antiterrorisme, mais aussitôt remis en liberté. Les enquêteurs soupçonnent ce forgeron rouennais d’une trentaine d’années d’être le fabricant des crochets utilisés pour les sabotages de caténaires en 2008.

Il n’a pas été mis en examen dans le cadre de ce dossier, mais a comparu début février à Rouen devant le tribunal correctionnel pour refus de se soumettre à des tests ADN. Mais, selon le journal Le Monde, l’ADN de Charles Torres était déjà en possession des enquêteurs. Pour maître Dosé, la relaxe prononcée mercredi pour son client “est une forme de critique à l’égard d’une procédure menée par la Sdat (sous-direction de l’antiterrorisme, NDLR) de façon assez lamentable“. Il y a une dizaine de jours, les avocats de Charles Torres ont en conséquence “déposé une plainte pour faux en écriture publique et tentative d’escroquerie au jugement”, a précisé Me Dosé.

“Les policiers avaient falsifié certains éléments de leur enquête”

Selon elle, les enquêteurs de l’antiterrorisme “ont essayé d’escroquer le tribunal correctionnel de Rouen” pour obtenir légalement l’ADN de son client. En novembre 2012, les avocats du groupe de Tarnac avaient fait état de nouveaux éléments prouvant, selon eux, que les policiers avaient falsifié certains éléments de leur enquête. Ils avaient aussi annoncé le dépôt d’une plainte avec constitution de partie civile pour subornation de témoin contre des policiers à Clermont-Ferrand, les accusant d’avoir fait pression sur un témoin à charge anonyme quelques jours après les faits. Les avocats avaient aussi mis en cause l’utilisation d’informations fournies aux enquêteurs par un policier britannique “infiltré” au sein du groupe de Tarnac.

Publié par des larbins de la maison Poulaga (Agence Faut Payer via LePoint.fr, 6 mars 2013)

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION
17 février 2013 7 17 /02 /février /2013 11:57
En réaction au geste de désespoir de Djamal mercredi 13 février devant un Pôle Emploi nantais, une manifestation spontanée part samedi après midi du centre ville, en solidarité avec ses proches et contre la précarité.

p1020182.jpg

Ce drame, provoqué par le système capitaliste et la guerre aux pauvres a une teneur politique. La manif a revêtu la forme d'une marche quasi-silencieuse en hommage à Djamal, sa famille ouvrant le cortège. Les manifestant-e-s, militant-e-s ou non, proches ou non de la famille, ont respecté ce choix. 200 personnes ont donc défilé sans slogan ni drapeau, avec une tristesse et une rage digne et contenue.

Devant le monument aux 50 Otages a lieu un moment de recueillement et de prise de parole des proches de Djamal. 

C'est ce moment que choisissent les homophobes de la « manif pour tous » opposée au mariage des homosexuels pour venir défiler bruyamment en vélo, avec leurs drapeaux roses et bleus, leurs ballons, et leur sonnettes insupportables.

Quelques manifestant-e-s viennent leur demander de respecter l'hommage et de déguerpir en silence : les fachos répondent par des propos insultants et par un redoublement de leurs sonnettes. Certains manifestants homophobes se font menaçants, veulent en venir aux mains.

Deux cars de police arrivent en trombe, des flics descendent, visiblement survoltés : il s'agit de la sinistre Compagnie Départementale d'Intervention, coutumière des violences policières à Nantes.

La scène est alors indécente, surréaliste.

Tout va très vite. D'entrée, ils se casquent et bousculent brutalement les manifestant-e-s de la manif en hommage à Djamal (pourtant familiale, calme), puis sortent une gazeuse qu'ils braquent à quelques centimètres des yeux de certains. Un flic pousse une camarade à terre violemment alors qu'une homophobe la nargue bien à l'abri derrière les casqués.

Les esprits s'échauffent, on s'indigne de la brutalité des flics. La réponse est immédiate : un porc gaze copieusement les manifestant-e-s alors qu'un autre frappe un coup de matraque de toute sa force en plein dans le visage d'un camarade qui se met à saigner abondamment. Plusieurs personnes sont sonnées par le gaz ou les coups.

Évidemment, les journalistes, vautours avides de sensationnalisme émotionnel, présents en nombre Place Royale au début du rassemblement, sont absent quand il s'agit de filmer des violences policières. 

Le défilé des homophobe se poursuit: dès que leur cortège a fini de passer devant nous, les flics remontent dans leur fourgons et repartent comme si de rien n'était. 

Non seulement la police nantaise a couvert les fachos qui dérangeaient et provoquaient l'hommage, mais elle a une nouvelle fois agressé gratuitement et violemment des manifestant-e-s.

Jusqu'à quand ?

Ni oubli, ni pardon.

p1020184.jpg

Socialistes au travail
Socialistes au travail

Politique socialiste

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION
17 février 2013 7 17 /02 /février /2013 11:57
En réaction au geste de désespoir de Djamal mercredi 13 février devant un Pôle Emploi nantais, une manifestation spontanée part samedi après midi du centre ville, en solidarité avec ses proches et contre la précarité.

p1020182.jpg

Ce drame, provoqué par le système capitaliste et la guerre aux pauvres a une teneur politique. La manif a revêtu la forme d'une marche quasi-silencieuse en hommage à Djamal, sa famille ouvrant le cortège. Les manifestant-e-s, militant-e-s ou non, proches ou non de la famille, ont respecté ce choix. 200 personnes ont donc défilé sans slogan ni drapeau, avec une tristesse et une rage digne et contenue.

Devant le monument aux 50 Otages a lieu un moment de recueillement et de prise de parole des proches de Djamal. 

C'est ce moment que choisissent les homophobes de la « manif pour tous » opposée au mariage des homosexuels pour venir défiler bruyamment en vélo, avec leurs drapeaux roses et bleus, leurs ballons, et leur sonnettes insupportables.

Quelques manifestant-e-s viennent leur demander de respecter l'hommage et de déguerpir en silence : les fachos répondent par des propos insultants et par un redoublement de leurs sonnettes. Certains manifestants homophobes se font menaçants, veulent en venir aux mains.

Deux cars de police arrivent en trombe, des flics descendent, visiblement survoltés : il s'agit de la sinistre Compagnie Départementale d'Intervention, coutumière des violences policières à Nantes.

La scène est alors indécente, surréaliste.

Tout va très vite. D'entrée, ils se casquent et bousculent brutalement les manifestant-e-s de la manif en hommage à Djamal (pourtant familiale, calme), puis sortent une gazeuse qu'ils braquent à quelques centimètres des yeux de certains. Un flic pousse une camarade à terre violemment alors qu'une homophobe la nargue bien à l'abri derrière les casqués.

Les esprits s'échauffent, on s'indigne de la brutalité des flics. La réponse est immédiate : un porc gaze copieusement les manifestant-e-s alors qu'un autre frappe un coup de matraque de toute sa force en plein dans le visage d'un camarade qui se met à saigner abondamment. Plusieurs personnes sont sonnées par le gaz ou les coups.

Évidemment, les journalistes, vautours avides de sensationnalisme émotionnel, présents en nombre Place Royale au début du rassemblement, sont absent quand il s'agit de filmer des violences policières. 

Le défilé des homophobe se poursuit: dès que leur cortège a fini de passer devant nous, les flics remontent dans leur fourgons et repartent comme si de rien n'était. 

Non seulement la police nantaise a couvert les fachos qui dérangeaient et provoquaient l'hommage, mais elle a une nouvelle fois agressé gratuitement et violemment des manifestant-e-s.

Jusqu'à quand ?

Ni oubli, ni pardon.

p1020184.jpg

Socialistes au travail
Socialistes au travail

Politique socialiste

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION
15 février 2013 5 15 /02 /février /2013 12:38

À Nantes, le 12 février 2013

Flashball : aujourd’hui comme hier, la police française mutile

À Strasbourg comme à Nantes, Montreuil, Toulouse, Mayotte, Villiers le Bel, Montbéliard, Montpellier, Chefresne et ailleurs, la police continue de mutiler au flashball.

http://juralib.noblogs.org/files/2013/02/20.jpg

Le 6 février à Strasbourg, un Gendarme Mobile vise délibérément à hauteur de visage avec son Lanceur de Balles de Défense (image euronews).

Mercredi 6 février 2013, alors que des salariés en lutte d’Arcelor Mittal menacés par leur patron viennent défendre leur emploi en manifestant à Strasbourg, les forces de l’Ordre ont délibérément fait feu au flashball (Lanceur de Balles de Défense) dans le visage d’un manifestant : John, intérimaire, a perdu un œil.

Cette mutilation n’est pas une « bavure ». Les précédents sont innombrables : la police française tue, mutile ou blesse, et en particulier au flashball qui incarne un nouveau processus de militarisation de la police.

J’ai été blessé au visage par un tir de Lanceur de Balles de Défense en novembre 2007 lors d’une manifestation lycéenne, à l’âge de 16 ans. J’ai depuis perdu la vue d’un œil.

Cette arme, puissante, précise, sophistiquée, était alors en expérimentation. D’abord testée dans les quartiers populaires, contre les « incontrôlables » ou les manifestations spontanées de lycéens et d’étudiants, le flashball est désormais utilisé contre des grévistes et des syndicalistes. L’usage de cette arme s’intensifie et s’élargit : nous sommes tou-te-s concerné-e-s, tou-te-s des « cibles » potentielles d’une police qui vit dans la toute puissance et l’impunité.

L’utilisation du flashball, est lancée par Guéant, renforcée par Sarkozy et validée par Valls : c’est désormais la police socialiste qui mutile à Strasbourg et tire à Notre-Dame-des-Landes.

La police continue de mutiler car la Justice lui donne carte blanche : après plus de 4 ans de combat judiciaire acharné pour faire comparaître Mathieu Léglise, le policier qui m’a tiré dessus, en avril 2012, un juge nantais prononce sa relaxe et consacre l’impunité policière : il n’aurait fait « qu’obéir aux ordres » (sic).

Le flashball est une arme de terrorisation : il doit faire peur, frapper l’imaginaire collectif en frappant physiquement des individus.

Jusqu’à quand allons nous laisser la police détruire des vies ?
Jusqu’à quand la police restera-t-elle impunie ?
Quand préférerons nous enfin la révolte à la peur ?

Solidarité avec John et toutes les cibles du terrorisme d’État.

Pierre, une « cible » du flashball parmi d’autres
Blog du groupe de travail du 27 novembre 2007

 

Le gomme-cogne, une arme critiquée

La blessure d’un manifestant qui a perdu un œil mercredi à Strasbourg, atteint par un tir de gomme-cogne, s’inscrit dans une liste de blessures graves provoquées par cette arme depuis 2005. Cette catégorie d’armes, comprenant notamment le Flash-Ball et le LBD40, au tir plus puissant, est régulièrement critiquée depuis qu’elle a été étendue à la police de proximité en 2002.

Le gomme-cogne, ou lanceur de balles de défense, est une arme dite sublétale de quatrième catégorie, comme le pistolet à impulsions électriques Taser. Ces équipements tirent des balles en caoutchouc ou en mousse en principe non perforantes, de calibre variable selon les équipements (44 mm pour le Flash-Ball, arme à portée réduite, et 40 mm pour le LBD40, précis jusqu’à 40 mètres).

2005 – 7 juil: Aux Mureaux (Yvelines), un garçon de 14 ans est sérieusement blessé à l’œil par le tir d’un policier qui le poursuit. Le policier indique s’être senti menacé.

2006 – Dans la nuit du 28 au 29 octobre, dans une cité HLM de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), un adolescent de 16 ans est blessé à l’œil lors d’incidents avec la police venue au secours de pompiers caillassés.

2007 – 27 nov: Un lycéen de 16 ans [Pierre Douillard] perd l’usage d’un œil après avoir été touché à l’issue d’une manifestation contre la loi Pécresse à Nantes.

2009 – 8 juil: Le réalisateur Joachim Gatti, 34 ans, touché par un tir, perd un œil lors d’une manifestation contre une expulsion de squatteurs à Montreuil (Seine-Saint-Denis). - 19 mars : Joan Celsis, un étudiant de 25 ans, est gravement blessé à l’œil en marge d’une manifestation d’étudiants à Toulouse quand la police tente de déloger un groupe de manifestants d’un magasin Monoprix. - 1er mai : À la cité des Fauvettes, à Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis), Samir Aït-Amara, 18 ans, joue à une “chasse à l’homme” avec des jeunes de la cité lorsque, selon sa sœur, un policier sort d’une voiture et lui tire dessus à moins de trois mètres sans sommation. Il perd l’audition de l’oreille gauche. - 9 mai : À Villiers-le-Bel (Val-d’Oise), deux hommes de 21 et 31 ans sont grièvement blessés à un œil lors de violences entre des groupes de jeunes et la police.

2010 – 14 oct: Un élève de 16 ans du lycée Condorcet de Montreuil (Seine-Saint-Denis) [Geoffrey] est gravement blessé à un œil lors d’affrontements avec des policiers. - 12 déc:Alors que la police intervient dans une rixe entre locataires, un résident d’un foyer de Marseille [Mosefa] âgé de 43 ans, atteint d’un tir au thorax, meurt d’un arrêt cardiaque le lendemain.

2011 – 7 fév: Un adolescent de 17 ans [Ayoub Boutahra] est éborgné par un tir à Audincourt (Doubs). Une instruction visant un policier est ouverte en janvier 2012. - 4 oct: À Mayotte, un enfant de 9 ans [Nassuir] perd un œil à la suite du tir d’un gendarme.

[2012 - 21 sept: Casti, un supporter, perd un œil suite à un tir de la BAC au stade de Montpellier- NdJL]

2013 – 6 fév: John David, 25 ans, intérimaire belge d’ArcelorMittal, touché par une balle en caoutchouc, perd un œil lors de la manifestation des “métallos” à Strasbourg, à proximité du Parlement européen.

Leur presse (LEssor.org, “le premier journal indépendent de la gendarmerie”, 8 février 2013)

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION
14 février 2013 4 14 /02 /février /2013 17:13

Je me souviens très bien de ce que j’ai ressenti la première fois que j’ai pris de l’héro. C’était fort, c’était intense, mais ce n’était pas du plaisir. Non. C’était du soulagement.

MAKING OF

Nous avons publié début février un texte de Salomée, 24 ans, blogueuse – « Pute et violée, je trouve violent qu’on normalise ce que je vis » – qui a provoqué beaucoup de réactions et suscité de nombreux commentaires (366).

Parmi ceux-là, assez peu d’attaques de son activité prostitutionnelle, et beaucoup de jugements sur sa toxicomanie. En résumé, selon les mots de l’auteure, peu de putophobie et beaucoup de toxicophobie, c’est-à-dire de peur, haine et négation des toxicomanes. Blandine Grosjean

D’un seul coup, plus rien ne pouvait me toucher si je ne l’avais pas décidé. Et l’immense sérénité qui m’a envahie s’apparentait bien plus à une forme d’apaisement qu’à une forme de jouissance. Ça a été comme une révélation, une réponse.

Enfin, j’avais trouvé quelque chose qui atténuait un peu la puissance de ce rat crevé que j’avais dans le fond du ventre. Quelque chose qui faisait taire ce mal-être constant que je traînais partout avec moi, sans savoir d’où il venait ni qu’en foutre. Quelque chose pour reprendre le contrôle sur ma vie en la rendant de nouveau supportable.

« Tout plaisir a un prix, hein »

Il est commun de considérer que les usagers de stupéfiants et les toxicomanes se droguent « pour le plaisir ». Et comme chacun sait (surtout Dieu d’ailleurs...), tout plaisir a un prix, hein. Pour l’usager récréatif, c’est la gueule de bois. Pour le toxicomane, ce sont les affres de la dépendance.

Il existe tellement de poncifs au sujet des usagers de drogues et des toxicomanes... Et en plus d’être nombreux, ils sont aussi validés médiatiquement et institutionnellement. L’ensemble de ces poncifs pourrait porter le nom de « toxicophobie ».

Au choix, j’ai entendu dans ma vie :

  • « C’est des délires de camé, ça n’a donc aucune espèce de crédibilité » ;
  • « Quand on veut se mettre hors du système, on a rien à recevoir de ce système » ;
  • « Quand on passe sa vie à taper de la chnouf en boîte de nuit, à un moment faut en payer le prix, c’est normal » ;
  • « Les camés, ils vendraient leur mère pour un rail de coke » ;
  • « Quand quelqu’un se drogue, ça se voit » ;
  • « Quand on se drogue, on n’est jamais dans son état normal » ;
  • « Il n’y a pas de pire malheur que d’avoir un enfant toxicomane. »

Débile, mais en plus dangereuse

J’avais juste 17 ans quand mes parents ont appris que je consommais de l’héroïne (je consommais alors quotidiennement depuis deux ans et des poussières). Un soir, ma mère et moi sommes allées chercher des pizzas à emporter. Le type qui tenait la caisse nous a accueillies chaleureusement car il avait reconnu ma mère.

« Ha mais c’est vous qui travaillez au [nom du magasin dans lequel travaillait ma mère] ! C’est sympa là-bas ! »

Quelques jours plus tard, ce même type m’a aperçue dans la rue, accompagnée de son ex-copine, elle-même toxicomane. Ni une ni deux, il a alors cherché et composé le numéro du magasin dans lequel travaillait ma mère pour la prévenir.

« Vous ne me connaissez pas, je vous ai vue avec votre fille un soir au restaurant, il faut absolument que je vous prévienne, votre fille se drogue, elle prend de l’héroïne. »

Quand je suis rentrée chez moi ce soir-là, mes parents m’attendaient dans le salon. J’ai tout de suite compris qu’il y avait un problème, quelque chose de grave. J’ai pensé en premier lieu que mon frère avait eu un accident ou que mon père avait perdu son travail, à tout un tas de trucs en fait, mais pas du tout à moi, étrangement. J’avais immédiatement intégré qu’il était primordial que je cache ma consommation si je ne voulais pas finir enfermée ou en taule, et je faisais donc extrêmement attention à tout verrouiller.

Mon père a alors pris la parole :

« – Salomée, on sait que tu prends de l’héroïne.

– Heu... ?

– Pas la peine de nier, c’est quelqu’un qui nous l’a dit, et c’est une source absolument fiable.

– Ha bon ? Et je pourrais savoir laquelle ?

– Non, ça ne te regarde pas. Et puis de toute façon c’est pas le problème. »

S’en est suivi un détail du plan qui avait été établi en mon absence pour que je sois – immédiatement et pour toujours – « sevrée de ma merde ». Un truc à base d’enfermement en hôpital psychiatrique, de main courante déposée pour me dissuader, de portable et carte de retrait spécial ado que je devais lui remettre immédiatement, et d’autres trucs dans ce genre.

Je voyais mon père me parler comme si j’étais soudainement devenue non seulement débile, mais en plus dangereuse.

Etre toxico implique qu’on a tous les droits sur vous

Ses mains tremblaient, il appuyait bien toutes ses phrases, cherchant une approbation que ok, c’est bon, j’avais bien compris, j’étais pas encore assez stone pour pas capter, j’allais pas soudainement péter les plombs et sortir un couteau pour le menacer, yeux injectés de sang en prime. C’était ainsi. Etre toxico implique qu’on a tous les droits sur vous.

Votre vie ne vous appartient plus. Les gens vous la prennent, se l’échangent. L’idée même d’intimité n’est plus concevable, l’éventualité que vous puissiez avoir un truc à dire dans tout ça n’a pas sa place. Car c’est bien connu : les toxicos sont dans le déni, ne pas ressentir le besoin ou l’envie de l’abstinence est un symptôme de leur maladie, et il est de la responsabilité morale de tout un chacun de délivrer le malade de celle-ci, avec ou sans son accord.

Peu importe vos raisons, peu importe ce qui vous a fait vous attacher à un ou des produits, peu importe que vous ne vous sentiez absolument pas prêts, les autres savent mieux, car n’ayant plus toute votre tête, vous ne pouvez plus avoir un regard pertinent sur votre santé et sur vous-même. Je n’ai pas protesté. Je ne me suis pas justifiée. Je n’ai même pas essayé de mentir.

Juste, quand mon père m’a demandé de lui donner les produits que je possédais, j’ai répondu que justement, j’en avais pas aujourd’hui, et devant son sourcil dubitatif, je lui ai craché un insolent « tu veux peut-être venir chercher dans ma culotte pour être sûr ? » qui l’a découragé. Quand il a terminé sa tirade, ma mère est entrée en scène, cette fois-ci pour le couplet « tu te rends compte comme tu nous fous la honte » et « pourquoi tu nous fais ça ? ».

A la fin de cette interminable réunion, tout le monde est allé se coucher. Mon père :

« On part à l’hôpital à 8 heures, me fais pas le coup du réveil loupé ; de toute façon, c’est moi qui viendrai te réveiller. »

Un bon toxico est un toxico sevré

Mon père ne m’a jamais conduite à l’hôpital le lendemain matin. Quand il est entré dans ma chambre, je n’étais plus là. Et ni lui, ni ma mère n’ont eu de contact avec moi les dix mois suivants. Les retrouvailles physiques ont demandé un an.

Ces mois-là, je les ai passés à la rue, dans une situation du genre on peut pas pire. Mineure signalée en fugue, terrorisée par mes parents, par la police, obligée de me cacher et de me méfier de tout le monde – plus encore qu’à l’habitude – et donc, toxico par-dessus tout. Une situation du genre on peut pas pire, mais pour moi si.

Le sevrage imposé, brutal, violent, le retour à l’état d’avant, surtout ça en fait, et l’enfermement en HP et tout ce qu’il implique, pour moi c’était pire, absolument pire. Et ça valait, aussi dingue que cela puisse paraître, toutes les autres douleurs du monde.

La sagesse populaire veut que « permettre à une toxicomane de consommer sa drogue, ce n’est pas l’aider ». Car qu’on se le dise : un toxico actif est un toxico qui doit être sevré. Pas d’alternatives, pas de nuances, sevrage et abstinence sont les seules voies envisageables, concevables et autorisées. Stabilisation et équilibre ne sont même pas effleurés, ne serait-ce qu’en idée.

Le moteur du toxico : le vice incontrôlé

Il y avait cette fille dans ma fac. Ses parents sont tombés sur un petit keps de came qu’elle avait planqué pour les urgences dans une petite boîte de sa chambre. Ils ne lui ont rien dit le jour même, ont commandé un test sur Internet, et quelques jours plus tard, il lui ont fait pisser de force dessus. Positive à la cocaïne et l’héroïne.

LA MAMAN DES TOXICOS

J’ai connu une femme qui avait appris que son fils se piquait. Passée la colère des premiers jours, elle lui a dit : « Ok, je peux tout entendre, vraiment tout, je te promets que je ne vais rien faire, je veux juste savoir, et que tu me parles. »

En quelques jours, il a sorti le gros de l’affaire. Sûrement pas tout, mais une bonne partie. Sa mère s’est alors renseignée sur un tas de trucs en matière de réduction des risques. C’était devenu son obsession.

Elle a parlé avec son fils de façon claire et directe, les problèmes d’hygiène, de filtrage du produit, elle l’a dirigé vers des centres où il pourrait trouver du matos approprié, elle a même proposé de l’y accompagner.

Cette femme était très connue par les toxicos de ma ville. C’était un peu la maman de tout le monde en fait. Elle avait décidé non pas de baisser les bras, mais d’accompagner son fils, d’essayer de le protéger le plus possible en somme.

Quelques mois après la découverte du pot aux roses par sa mère, le fils a décidé, d’un coup, d’entreprendre les démarches pour passer à la substitution. Il avait déjà énormément diminué les shoots au profit de méthodes moins... douloureuses.

Evidemment, elle a eu le droit au classique confiscatoire (carte de retrait, téléphone, etc...), et en prime, à une semaine d’horreur enfermée dans sa chambre par ses parents avant qu’ils ne la collent en désintox (c’est que, contrairement à ce que beaucoup pensent, les places disponibles se sont pas légion).

Cette fille, pourtant, avait de bons résultats à la fac. Elle voulait devenir prof, ou graphiste « si je me retrouvais par malheur avec un casier [pour infraction à la législation des stups] d’ici-là ! ».

Son année de fac a donc bien sûr été sabrée, et toutes les autres aussi, puisqu’elle n’a tout bonnement jamais repris ses études. La dernière fois que je l’ai vue, ça remonte à l’année dernière je crois, c’était dans la rue : elle est venue me voir, flippée, pour savoir si je n’avais pas un plan came sous le coude...

Des histoires de ce genre, on en trouve des pelletées chez les toxicos, et même chez les usagers récréatifs qui se font prendre au moment de leurs écarts (sans succès au niveau des démarches hospitalières pour eux cela dit, juste un gros foutage de merde dans la vie professionnelle, familiale, personnelle, selon les « méthodes » entreprises par les « sauveurs »).

Elles racontent bien à elles seules l’absurdité de la sacralisation du sevrage et de l’abstinence, qui elle-même résulte de l’absurdité de ce qu’on considère comme moteur des consommateurs de drogues : le vice incontrôlé.

« La » drogue rend voleur, menteur, et violent

Quand il ne s’agit pas de fuir les ardeurs de ceux qui veulent nous enfermer « pour notre bien », il s’agit de fuir celles de ceux qui veulent nous enfermer parce que nous sommes des criminels. Au moment où j’écris ces lignes, le simple fait d’être en vie, dans mon état, avec mon sang qui circule tel qu’il l’est dans mon corps, fait de moi une criminelle passible d’un an d’emprisonnement et de plusieurs milliers d’euros d’amende.

S’ajoutent à cela les dix années d’emprisonnement et les dizaines de milliers d’euros d’amende que j’encours parce que je possède les produits relatifs à cet état. C’est là, toujours au-dessus de ma tête, prêt à tomber en permanence.

Car il n’y a pas d’horaires pour perquisitionner et venir arrêter les toxicos. Et quand il s’agit d’infraction à la législation des stupéfiants, on n’a pour ainsi dire plus aucun droit (c’est en fait l’exact même régime qui est appliqué à ce problème qu’à celui du terrorisme...).

Sacralisation du sevrage et criminalisation des usagers trouvent une justification : la drogue rendrait voleur, menteur, et violent. En plus d’un tas d’autres trucs pas très sympas.

Loin de moi l’idée de clamer que les usagers de drogues ne mentent jamais. C’est faux. Effectivement, on est souvent amenés à mentir. Mais finalement, avons-nous réellement le droit de dire notre vérité ? Non.

Le mensonge, c’est la protection de nos vies

Dire la vérité dans notre cas revient à s’exposer à l’effondrement brutal et immédiat de la totalité des sphères de nos vies. Ce n’est pas le mensonge qui est une seconde nature chez les toxicos, c’est la protection.

J’entends déjà : « Haha, genre, quand on est capable de consommer des produits dangereux quotidiennement, on s’en fout de se protéger ! »

Etre toxico n’empêche absolument pas d’avoir un regard sur soi ou sur sa santé. La dangerosité des drogues tient bien plus au contexte socio-législatif qu’aux produits en eux-même.

J’en veux pour preuve les différences qui existent entre les toxicos qui adoptent une hygiène de vie assez stricte parallèlement à leur consommation, et ceux qui ne le font pas (par manque de moyens, par abandon...), mais aussi entre ceux qui ont subi les ardeurs judiciaro-carcérales et les autres.

Un tox en manque, c’est quelqu’un de faible

Concernant la petite criminalité souvent associée (et certainement parfois d’une façon bien trop systématique) aux consommations de drogues, c’est indéniable, elle existe.

Il est probable qu’une situation de dépendance, et surtout de manque, favorise parfois un passage à l’acte de fait de violence (en revanche, n’oublions pas qu’un tox en manque, c’est surtout quelqu’un de faible plus qu’autre chose).

Cela dit, il a été remarqué dans tous les pays qui ont adopté une législation qui décriminalisait les usagers ou qui ont adopté des dispositifs de salles de consommation à moindres risques que la petite criminalité relative aux drogues baissaient de façon quasi immédiate et très significative.

Cela s’explique très simplement par divers facteurs, et en premier celui qui donne aux toxicomanes l’autorisation d’exister au moment présent (et pas uniquement dans un futur où ils seront abstinents).

Moi-même j’ai volé pour ma came, dans les premières années de ma consommation. Des dealers principalement, pas des grands-mères comme le voudrait le stéréotype... D’ailleurs je n’ai jamais connu de toxs qui volaient des sacs à main de grand-mères, mais bref.

Gérer mon manque avec la méthadone

J’ai cessé de le faire du jour au lendemain, une fois que j’ai pu me faire prescrire de la Méthadone, par un médecin qui a décidé de se mettre dans l’illégalité pour avoir les moyens de travailler correctement.

En fait, c’est simple : à partir du moment où les moyens de gérer mon manque m’ont été donnés, mes impulsivités et coups de panique ont diminué jusqu’à simplement disparaître. Problème : aujourd’hui, la Méthadone est normalement délivrée sous condition d’abstinence démontrée via contrôles d’urine bi-hebdomadaires, ou alors carrément quotidiens (dans ce cas-là, il est nécessaire de se rendre en centre tous les jours pour avaler son médicament devant un soignant).

Dans les faits, les usagers qui ne tiennent pas l’abstinence cessent tout simplement de se présenter à leurs rendez-vous s’ils ont « fauté », et en plus, ils développent une forme de honte qui compromet très souvent leurs chances de retenter une prise en charge.

L’effet est donc doublement contre-productif : les usagers ne gardent pas de contact régulier avec un médecin et ils sont de plus en plus dans le sentiment d’être livrés à eux-mêmes.

Les toxicos invisibles, pas le droit d’exister

La vindicte populaire s’acharne surtout – et comme d’habitude – sur la catégorie de ceux qui n’ont pas les moyens matériels de se cacher, de s’entretenir, et de s’intégrer. Ceux qui sont dans une extrême misère, les étrangers en situation irrégulière, les sans-abris, les « accidentés » de la vie et les inadaptés du capitalo-libéralisme. Et finalement pour ceux-là, qu’ils soient usagers ou non de stupéfiants ne change pas grand-chose : dans tous les cas ,ils perdent.

Mais en réalité, la majorité des usagers de stups et des toxicos est invisible. Elle ne se dit pas, ne se montre pas, et a très bien intégré la toxicophobie ambiante.

Elle n’a le droit à aucune espèce de forme de réunion, de revendication, puisqu’elle n’a tout bonnement pas le droit d’exister. Elle n’a le droit à aucune forme de contradiction et doit supporter le deux poids deux mesures en silence : c’est criminel de faire tourner les réseaux pour acheter de la drogue, mais pas d’aller aux putes ou de faire travailler des esclaves pour acheter un smartphone neuf tous les ans...

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION
9 février 2013 6 09 /02 /février /2013 12:39

our avoir refusé de donner son ADN aux officiers de l’anti-terrorisme, Charles Torres, « le forgeron de l’affaire Tarnac », lavé de tous soupçons depuis, est passé devant la justice. Le délibéré sera rendu par le tribunal de grande instance de Rouen le 6 mars 2013.

http://juralib.noblogs.org/files/2013/02/071.jpg

Mercredi 6 janvier 2013, Charles Torres était jugé pour refus de se soumettre au prélèvement d’ADN. Prélèvement demandé par la cellule anti-terroriste lors d’une garde-à-vue justifiée par sa possible appartenance à l’affaire Tarnac. Au moment de cette garde-à-vue, le 23 février 2012, Charles Torres, forgeron de profession, est soupçonné d’être l’artisan des crochets qui auront servi en 2008 à saboter des caténaires de la SNCF.

Le palais de justice de Rouen accueille donc le jour de l’audience du « Forgeron de Tarnac », tous ses soutiens, sa famille et une bonne dizaine de journalistes alléchés par cette audience connexe à l’affaire Tarnac. Quelques policiers, arnaché de gilets pare-balles et de talkie-walkies. Normal, c’est le procès d’une personne qui soupçonnée début 2012 d’association de malfaiteurs dans une entreprise terroriste.

La juge aura dû, en début d’audience faire taire le public venu en nombre pour soutenir Charles Torres. Celui-ci a souhaité lire devant le tribunal « sa plaidoirie » car il n’est « pas très à l’aise à l’oral ». L’homme de 28 ans, spécialisé dans la forge médiévale, a commencé son diatribe timidement, posant la question qui le taraude : « Pourquoi suis-je ici devant vous aujourd’hui ? Je ne le sais pas, personne ne le sait. À part peut-être, l’officier de la DCRI que j’ai vu arpenter ce tribunal aujourd’hui, avec une veste de moto. »

Le forgeron a eu à cœur de pousser les traits d’ironie, malgré sa gêne à parler publiquement. Il s’est même retourné une fois vers l’assemblée pour chercher du regard un soutien. « Adressez-vous au tribunal », le reprendra la juge. Après avoir raconté sa garde à vue, Charles Torres, cultivé et aux mots littéraires, donne ses hypothèses sur les raisons de sa présence devant le tribunal, s’appuyant sur sa connaissance du droit, de l’histoire et sa culture politique. « Dans refus de se soumettre au prélèvement biologique, il y a refus de se soumettre », commence-t-il, « On incrimine ici ma volonté. »

Le forgeron de Roncherolles-sur-le-Vivier explique ensuite pourquoi il s’est refusé à ce prélèvement d’ADN : « Je m’oppose au fichage génétique. » Il rappelle l’historique du Fichier national automatisé des empreintes génétiques (Fnaeg) initialement mis en place en 1998 pour ficher les délinquants sexuels, donc les personnes jugées coupables par la justice. Voulant prouver le ridicule de sa présence au tribunal, il se joue de l’adage « Qui vole un œuf, vole un bœuf » : « Qui vole un œuf, viole un bœuf. »

Sans désarmer, Charles Torres continue de justifier son refus de se soumettre, rappelant l’affaire Élodie Kulik, violée puis assassinée (2002). En 2011, les gendarmes parviennent à confondre l’un de ses agresseurs grâce à l’ADN de son père déjà fiché. Le forgeron s’appuiera sur ce détournement du Fnaeg : « Aujourd’hui, donner mon ADN, c’est donner celui de mon frère jumeau, mes parents et mes descendants ». Il conclut : « L’ADN est un instrument de contrôle. » Ce quart d’heure de discours est applaudi par l’assemblée.

http://juralib.noblogs.org/files/2013/02/091.jpgContre Charles Torres, le procureur a requis une peine « d’avertissement » : un mois de prison avec sursis. Ce qui ne suffit évidemment pas à Me William Bourdon et Me Marie Dosé, avocats de la défense. Ils s’appuient sur la pauvreté du dossier entre les mains du tribunal de Rouen. « Le tribunal de grande instance de Nanterre vous a confié un dossier de misère. Ce que vous savez, c’est ce que la presse vous a dit et ce nous vous disons », argumente Me Dosé.

Au dossier, quelques procès-verbaux, parfois non datés, ou des notifications de mise en garde à vue de Charles Torres. Le tribunal n’a pas accès au dossier de l’affaire Tarnac dans lequel figurent les raisons pour lesquelles le forgeron a été soumis à une garde à vue. « On vous empêche de vérifier s’il y avait des raisons plausibles pour le détenir » et donc pour lui demander son ADN.

Et Me Dosé d’avancer : « Dans la procédure Tarnac, Charles Torres n’est rien sauf les conséquences de son refus » de se soumettre au prélèvement biologique. Dans leur plaidoirie, les deux avocats du forgeron frôlent la violation de l’instruction judiciaire, sans jamais vraiment tomber dedans. « Les policiers mentent au tribunal, il n’y avait aucune raison pour le mettre en garde à vue, vous devez sanctionner cette manipulation judiciaire », reprend Me Bourdon qui considère le dossier Charles Torres comme « un vide intersidéral ».

Le tribunal rendra son délibéré le 6 mars 2013.

L’affaire du Forgeron soulève une question de constitutionnalité

Charles Torrès est jugé pour avoir refusé de donner son ADN aux policiers de l’anti-terrorisme dans le cadre de l’affaire Tarnac. Pour aller plus loin, ses avocats ont tenté de mettre en doute la constitutionnalité du prélèvement ADN à répétition et du fichage de tout un chacun. Le délibéré sera rendu le 6 mars 2013.

Le procès de Charles Torres, s’est ouvert ce mercredi 6 janvier 2013, au tribunal de grande instance de Rouen. Il est jugé pour avoir refusé de donner son ADN lors d’une garde à vue dans le cadre de l’affaire Tarnac. Ses avocats, Me William Bourdon et Me Marie Dosé, tous les deux au dossier de l’affaire Tarnac, essaieront de poser une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

Entrée en vigueur en 2010, la QPC permet de mettre en doute la constitutionnalité d’une loi déjà promulguée. Elle peut être posée par n’importe quel citoyen. On la pose devant un tribunal qui décide ou non de la transmettre à la cour de cassation.

Dans l’affaire de Charles Torres, ses avocats mettent en doute la constitutionnalité de l’article 706-56 du code de procédure pénal. Cet article encadre le prélèvement de l’empreinte biologique. Pour Me Bourdon, le dossier de Charles Torres, si petit et si peu extraordinaire soit-il, permettrait « d’envoyer un message puissant aux législateurs ». L’avocat remet en question l’alinéa 4 de l’article. Cet alinéa qui permet qu’en cas de refus de prélèvement, les officiers de police judiciaire peuvent récupérer l’ADN s’il est détaché du corps. « Lorsque Charles Torres refuse de se soumettre, il ne sait pas, que dans son dos, ou plutôt dans ses cheveux, on prélèvera la particule magique », plaide Me Bourdon, « S’il avait su que les policiers de la Sdat pouvaient faire cela, il aurait pu ajuster son comportement ». Ici, l’avocat pointe du doigt la faille de la loi qui peut conduire un citoyen à s’auto-incriminer sans être en mesure de se défendre.

L’avocat parle aussi « d’un cambriolage de l’enveloppe corporelle« , qui porte atteinte au droit de chaque citoyen de disposer de son corps. Enfin, pour plaider le dépôt de cette QPC, Me Bourdon pointe le « laisser-aller, la paresse » des policiers qui ne prennent pas le temps de vérifier si la personne concernée est déjà fichée qui peuvent conduire à une succession de prélèvements ADN sur un même citoyen.

Sans compter que le tribunal de Nanterre qui s’est dessaisi en 2012 de  cette affaire, a omis de prévenir le tribunal de Rouen que la justice était bien en possession de l’ADN de Charles Torres… jugé pour avoir refusé de le donner.

La procureur refuse la QPC au motif que l’article 706-56 du code de procédure pénale aura déjà été jugé constitutionnel, dans sa globalité, par la cour de cassation. Le tribunal est allé dans ce sens et a refusé de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité. Le procès de Charles Torres a donc bien eu lieu mercredi 6 février et les débats se sont donc poursuivis pour celui qui risque 15’000 euros d’amende et un an de prison ferme.

Publié par des larbins de la maison Poulaga (Zoé Lauwereys, Grand-Rouen.com, 7 février 2013)

 

Rencontre avec le « Forgeron » de Tarnac

Charles Torres a été « enlevé » par la police début 2012 dans le cadre de l’affaire Tarnac. Il est soupçonné, à ce moment là, d’être complice du sabotage de caténaires en 2008. Aucun fait n’aura été retenu contre lui. Pourtant, il est jugé mercredi 6 février 2013 au tribunal de grande instance de Rouen pour avoir refusé son ADN au moment de la perquisition.

http://juralib.noblogs.org/files/2013/02/08.jpegNous l’avons rencontré la veille de son procès pour refus de prélèvement génétique du 6 février 2013 au tribunal d’instance de Rouen. Avec son pull marin, ses cheveux en bataille, sa moustache et sa chevalière rehaussée d’une pierre blanche, il nous rejoint à la Conjuration des Fourneaux au 149 rue Saint-Hilaire. Le restaurant soutient Charles dans ses déboires judiciaires. Il nous raconte ces trente heures de garde à vue pendant lesquelles il a refusé de parler.

Ce matin du 23 février 2012, Charles Torres dort dans sa chambre, chez ses parents, à Roncherolles-sur-le-Vivier, près de Darnétal. À 28 ans, il y revient de temps en temps pour travailler. Son père, monteur en bronze, lui a installé dans son atelier, une forge pour qu’il puisse exercer son activité d’auto-entrepreneur forgeron. Il est 8 heures du matin quand une trentaine de policier de la sous-direction de l’anti-terrorisme (Sdat) frappe à la porte. « On a eu de la chance, il n’était pas 6 heures du matin et ils n’ont pas défoncé la porte », ironise celui que la presse surnommera le Forgeron dans l’affaire dite « de Tarnac ». Ce matin-là, les policiers de l’anti-terrorisme viennent perquisitionner. Ils pensent avoir trouvé celui qui a fabriqué les crochets en fer à béton responsables du sabotage de caténaires de la SNCF en 2008.

Pour ces faits, qui deviennent très vite l’affaire de Tarnac, dix personnes ont été mises en examen, pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » et « dégradations en réunion en relation avec une entreprise terroriste ». Les principaux accusés dans cette affaire sont Julien Coupat et sa compagne Yldune Lévy. Le rapport entre Tarnac et Charles Torres ? Ce dernier se l’explique facilement. « Je suis colocataire dans une maison, rue de Constantine, à Rouen, où plusieurs habitants, ont été mis en examen en 2008. Mais je n’étais même pas un des potes de Julien Coupat. Tarnac ce n’est même pas une bande de copains. Concrètement, on me soupçonnait d’avoir un comportement plus ou moins subversif d’un point de vue politique. » Charles avoue même ne pas connaître vraiment le dossier Tarnac, seulement ce que les mis en examen lui auront dit et ce qu’il aura lu dans les journaux. Il délivre son analyse : « Tarnac est devenu un groupe suite aux accusations. Il a fallu donner un cadre, d’où le nom. Ce qui fait que tu es dans le dossier ou pas, c’est ta place dans le scénario de la police. »

Quatre ans après le début de l’affaire de Tarnac, devenu au fil des années un bourbier judiciaire, la Sdat pense donc avoir trouvé un nouveau complice du sabotage. Ce 23 février 2012, « des flics de haut-vol » fouillent donc la maison des parents du forgeron après lui avoir signifié sa mise en garde à vue. Une garde à vue qui durera 35 heures. La perquisition aura fait beaucoup rire Charles qui avoue avoir eu « envie de plaisanter » mais s’être retenu par « peur qu’ils me prennent au premier degré ». « Ils ont fouillé toute la maison, ont retourné ma chambre, ont scruté mes bouquins, mon bureau, mes affaires de fac. Mais ils n’ont rien saisi dans ma chambre », se rappelle-t-il. « Pour prouver l’association de malfaiteurs et me lier aux mis en examen de Tarnac, ils ont saisi de vieux téléphones portables. » Rien non plus n’aura été saisi dans la forgerie, pourtant l’endroit le plus à même de receler des indices du sabotage. Et pourquoi pas quatre ans plus tard ? Charles se rappelle d’un détail qu’il raconte goguenard. « Dans la chambre de mon frère, ils ont trouvé deux cagoules trois trous. Elles avaient été utilisées pour l’enterrement de vie de garçon d’un copain », rit-il encore.

http://juralib.noblogs.org/files/2013/02/102.jpg

Charles Torres préférait ne pas être pris en photo.

La perquisition terminée, les policiers le menottent et l’emmènent « à 200 kilomètres/heure » à Levallois-Perret, dans les Hauts-de-Seine. Avant d’atteindre le siège de la Sdat, il rapporte avoir eu les yeux cachés par un masque de sommeil. « Là, j’ai senti que l’on descendait de cinq étages sous terre. Arrivés dans les locaux, on est passés de sas de sécurité en sas de sécurité »… jusqu’à la salle de garde à vue. Pendant ces 30 heures de garde à vue, Charles refusera de répondre aux questions : « J’ai décliné mon état-civil, sinon j’ai répondu des blagues ». La meilleure solution pour quelqu’un qui ne sait pas ce qu’on lui reproche, mis à part la vague « association de malfaiteurs ». « Ils n’avaient rien pour me mettre en garde-à-vue, il n’était pas question pour moi de leur donner de quoi me mettre en examen ». L’ancien étudiant en histoire se rappelle de quelques questions posées par la police. « Ils m’ont demandé ce que je pensais de la société capitaliste marchande ou quelles étaient mes opinions politiques », évoque-t-il. En lui présentant des photos des crochets utilisés pour saboter les caténaires, on lui aura même demandé s’il les avait fabriqués. Charles répondra avec l’ironie qui lui semble chère : « Vous m’amenez le modèle et je vous fais un devis ».

En fin de garde à vue, on lui demandera de donner son ADN, justifié par « des motifs graves ou concordants » dans l’affaire pour laquelle il était entendu. Chose qu’il refusera. Par conviction. « Je n’ai pas envie de faire partie d’un fichier ADN des catégories politiques », affirme-t-il. Pour lutter contre le « flicage », il refuse aussi d’avoir un téléphone ou une carte bancaire. Ce qu’il ne sait pas, à ce moment-là, c’est que la police a pris soin de nettoyer de fond en comble la salle de garde à vue, revèle Laurent Borredon, dans Le Monde du mardi 5 février 2013 : « Ce matin-là, les policiers ont nettoyé à fond les locaux de garde à vue, à l’aide d’une solution hydroalcoolique. Le bureau et le sol. Dans quelques instants, Charles Torrès va être entendu pour la quatrième fois. Les policiers souhaitent récupérer son ADN et il faut que tout soit immaculé. » Selon Le Monde qui s’est procuré le procès-verbal de la garde à vue, Charles fait bien en sorte ce jour-là de consommer « sa brique de jus d’orange sans en utiliser la paille » puis d’en « laver soigneusement l’extérieur, de sorte à n’y laisser aucune trace biologique. » Charles aura aussi mangé sans utiliser de couverts, « directement au moyen de ses doigts », pour être sûr de ne laisser aucune trace. Les policiers récupèrent tout de même quelques cheveux sur le sol du local où il était interrogé.

L’absurde du procès du mercredi 6 février 2013 ? La justice est en possession de l’ADN de Charles Torres mais on lui reproche de ne pas avoir voulu le donner. Il risque 15’000 euros d’amende et un an de prison ferme. Sur son blog, il appelle ses soutiens à « venir rire » au TGI de Rouen à 13h30, « parce qu’on ne peut que se réjouir de chaque humiliation que l’antiterrorisme s’inflige à lui-même ».

Publié par des larbins de la maison Poulaga (Zoé Lauwereys, Grand-Rouen.com, 6 février 2013)

 

Tarnac : un homme jugé pour refus de donner son ADN, déjà prélevé à son insu

Les policiers de la sous-direction antiterroriste (SDAT) de la police judiciaire n’ont pas peur de la contradiction. Le 24 février 2012, à 11h15, ils ont recueilli l’ADN de Charles Torrès, 28 ans, à son insu. Puis, à 11h35, ils ont lancé une procédure contre le jeune homme gardé à vue dans le cadre de l’affaire de Tarnac pour… refus de prélèvement génétique. Charles Torrès doit être jugé, mercredi 6 février, par le tribunal correctionnel de Rouen. Il risque, au maximum, un an de prison et 15’000 euros d’amende. À la suite de sa garde à vue, il avait été relâché sans charge, mais cela n’empêche pas d’être dans l’obligation de laisser son ADN. Il suffit qu’existent des “indices graves ou concordants” contre la personne entendue, indique le code de procédure pénale.

Ce matin-là, les policiers ont nettoyé à fond les locaux de garde à vue, à l’aide d’une solution hydroalcoolique. Le bureau et le sol. Dans quelques instants, Charles Torrès va être entendu pour la quatrième fois. Les policiers souhaitent récupérer son ADN et il faut que tout soit immaculé. Les enquêteurs veulent vérifier si le jeune homme, interpellé la veille près de Rouen, n’a pas forgé les crochets qui ont servi à saboter des lignes de TGV, à l’automne 2008.

“DÉLOYAUTÉ”

Charles Torrès est aussi prudent que les policiers sont méticuleux : il a “consommé sa brique de jus d’orange sans en utiliser la paille, puis en [a] soigneusement lavé l’extérieur, de sorte à n’y laisser aucune trace biologique (…). À l’heure du déjeuner, il a été constaté qu’il mangeait sans utiliser de couverts, directement au moyen de ses doigts”, note le lieutenant de la SDAT, dans son procès-verbal, que Le Monde a pu consulter.

Mais le stratagème réussit : les hommes de la police technique et scientifique parviennent à récupérer “les prélèvements de traces de contact” là où il “a apposé ses mains”. Encore mieux, “à l’aplomb du siège où [il] s’est assis, des cheveux jonchent le sol”. Précis, le policier indique “que la présence de ces cheveux au sol résulte de la propension qu’a manifestée Charles Torrès à se passer (nerveusement) les mains dans les cheveux”. Trente heures de garde à vue dans les locaux de la SDAT, c’est un peu stressant…

Comment justifier une procédure pour refus de prélèvement d’ADN quand on vient de le recueillir ? En faisant comme si de rien n’était : le procureur qui poursuit puis les magistrats qui vont juger le dossier “ADN” n’ont accès qu’aux pièces du dossier Tarnac que la SDAT veut bien leur transmettre. Le PV de recueil de traces génétiques a été opportunément exclu. Au contraire, une enquêtrice justifie la procédure en assurant que le prélèvement demandé à Charles Torrès “aurait utilement permis de déterminer le profil génétique de l’intéressé aux fins de comparaison avec les empreintes génétiques à ce jour non identifiées”.

“Il s’agit d’un symptôme de plus de la déloyauté qui contamine tout le dossier”, estime Me William Bourdon, l’un des avocats de Charles Torrès. Il souhaite déposer une question prioritaire de constitutionnalité, mercredi. Pour lui, les articles de loi sur les prélèvements d’ADN sont “défaillants” face au principe de libre disposition de son corps : l’officier de police judiciaire n’a pas d’obligation d’informer qu’il peut y avoir un prélèvement clandestin, puis que ce prélèvement a eu lieu — ce qui interdit tout recours — et, enfin, il n’est pas obligé de vérifier que le gardé à vue est déjà fiché, avec le risque d’une multiplication des prélèvements.

Et la comparaison des empreintes génétiques ? Au final, elle n’a rien donné.

Publié par des larbins de la maison Poulaga (Laurent Borredon, LeMonde.fr, 5-6 février 2013)

 

Pourquoi j’ai refusé de livrer mon ADN

Le 6 février 2013, Charles Torres comparaît au tribunal de Rouen pour avoir refusé le prélèvement de son ADN lors d’une garde à vue de 35 heures début 2012. Forgeron, on le soupçonnait de complicité dans l’affaire de Tarnac et d’avoir fabriqué les crochets qui servirent à bloquer des TGV en 2008.

Le 23 février 2012, je fis bien malgré moi une entrée fracassante dans l’affaire dite « de Tarnac ». Une escouade de policiers de la Sous-Direction antiterroriste (SDAT), avec à leur tête le médiatique juge Fragnoli, vint me sortir du lit de bon matin. Bien qu’habitant la Seine-Maritime, je devins ce jour-là « le forgeron de Tarnac ». À défaut de pouvoir établir le moindre lien entre les mis en examen et les fameux crochets, le juge voulait à toute force insinuer un lien entre eux et quelqu’un qui aurait pu les fabriquer. Je fus donc, avec mon père de 86 ans, soupçonné le temps d’une garde à vue d’avoir confectionné les crochets qui servirent à bloquer des TGV une nuit de novembre 2008.

On sait que le storytelling antiterroriste ne s’embarrasse guère de la vraisemblance, et les différents articles parus dans la presse lors de mon arrestation le reproduisirent fidèlement. Il n’y eut d’ailleurs à peu près personne pour mentionner le fait que je fus libéré au bout de 35 heures sans la moindre charge ; et ni le juge ni les policiers ne me présentèrent leurs excuses pour m’avoir ainsi kidnappé sans raison valable. Faute d’excuses, je pensais qu’ils auraient à cœur de se faire oublier pour ces 35 heures de séquestration légale. Sur ce point, c’est bien moi qui me suis trompé.

Comme je le précisais plus haut, des amis harcelés par l’antiterrorisme, j’en ai quelques-uns, à Rouen comme à Tarnac. Je lis la presse aussi. De ce fait, je sais comme tout un chacun que tout ce que l’on peut déclarer dans une garde à vue a vocation à être déformé et utilisé contre vous. Je réservais donc mes réponses aux questions des policiers sur mes idées politiques au juge en charge de l’enquête. Malheureusement, il ne crut pas bon de me recevoir. Quelques jours plus tard,  je fis tout de même l’effort de lui écrire afin de ne laisser aucun doute quant à l’erreur manifeste que représentait mon arrestation. Le jour même où cette missive devait paraître, le juge, qui allait être dessaisi, la recouvrit de l’annonce de son autodessaisissement. Il fit ainsi d’une pierre deux coups, et la missive ne parut jamais.

Pas plus que je n’avais de raison d’être en garde à vue à Levallois-Perret, n’avais-je de raison de livrer mon ADN à la police, qui de toute façon alla le récupérer lamentablement sous la forme d’un cheveu laissé sur le sol d’une salle d’interrogatoire. Je refusai donc. Faut pas pousser.

Mais refuser de donner son ADN est un délit, en soi. C’est-à-dire que même lorsque l’on vous l’a pris malgré vous, qu’on l’a analysé, qu’il vous a dédouané et que vous êtes à l’évidence lavé des soupçons qui avaient justifié qu’on vous le demande, vous êtes encore et toujours coupable d’avoir refusé. C’est cela la loi sur l’ADN, et c’est pour cela que je comparaîtrai au tribunal de Rouen ce mercredi 6 février.

De prime abord, on pourrait penser que je suis, ici, victime de l’un des effets pervers d’une loi mal formulée et qu’il suffirait d’un peu de bon sens pour que tout rentre dans l’ordre. C’est tout le contraire que mon procès révèle.

On peut ainsi remettre en question l’efficacité de l’ADN, et la mystification qui consiste à corréler une trace souvent partielle avec un acte. On peut évoquer ce professeur d’EPS récemment accusé d’avoir tiré sur la police à Amiens car son ADN avait été retrouvé sur une arme : il avait eu le malheur de revendre sa voiture à quelqu’un du quartier insurgé longtemps auparavant. Coup de chance, il put prouver qu’il était en Bretagne la nuit des tirs. On peut avancer le cas de cette chimiste assermentée de Boston, Annie Dookhan, qui par zèle a bidonné, des années durant, ses « expertises », ce qui aboutit à la remise en cause de dizaines de milliers de condamnations dans le Massachusetts. On peut faire valoir que les traces génétiques que partout nous déposons se mêlent et s’entrelacent avec toutes celles de tous ceux que nous croisons, que nous aimons. Que l’existence est toujours collective et qu’aucune analyse génétique ne permettra jamais de décrypter le monde tel qu’il est vécu.

On peut tout autant s’indigner du fait que ce qui fut initialement vendu comme le « fichier des violeurs » comporte aujourd’hui plus de 2 millions d’identifications. On peut même tomber des nues en lisant dans Le Monde du 21 février 2012 que désormais la police, grâce à un « vide juridique », détourne les garde-fous du FNAEG pour retrouver des gens grâce à l’ADN de leurs parents (ce qui fait évidemment exploser le nombre de personnes effectivement fichées à des dizaines de millions).

On peut arguer de tout cela, et certainement faut-il le faire. Mais c’est manquer l’élément essentiel. Ce qui nous pose problème avec le fichage ADN, ce n’est pas qu’il soit faillible. Ce qu’il y a d’effroyable dans le fichage génétique, c’est précisément son efficacité, son efficacité policière. Couplée à l’antiterrorisme dont on a vu qu’il permet d’arrêter à peu près n’importe qui pour à peu près n’importe quoi, la loi sur l’ADN ne fait qu’affranchir la police de toute contrainte légale pour assurer le maintien de l’ordre par tous les moyens nécessaires. C’est pourquoi elle sanctionne ceux qui, pour le vol d’un camembert, refusent de s’y soumettre. Dans l’époque mouvementée qui s’annonce, où l’ordre existant ne tient plus qu’à un fil, l’ADN est pragmatiquement un outil sans pareil.

C’est tout aussi pragmatiquement qu’il nous faut nous opposer à ce que la police détienne nos codes génétiques pour 20 ans. Parce qu’il n’est pas question de leur laisser un tel chèque en blanc. Parce que l’exiger au prétexte que quelqu’un serait anarchiste ou communiste voire syndicaliste, la police le fait déjà.

Ce n’est pas une question de loi, ni même de raison ou d’arguments, c’est la confrontation de deux pragmatismes : celui du contrôle des populations contre celui de l’insoumission du vivant. Cela relève du politique. C’est pourquoi il nous faut massivement et systématiquement nous soustraire aux relevés d’empreintes génétiques. Parce que l’arsenal sécuritaire derrière lequel cette société se retranche dit assez combien elle sait que ses jours sont comptés.

Les invités de Mediapart, 5 février 2013

Partager cet article
Repost0
Published by coutoentrelesdents - dans REPRESSION

A L’assaut Du Ciel!

  • : coutoentrelesdents
  • : Les spectateurs ne trouvent pas ce qu'ils désirent, ils désirent ce qu'ils trouvent.
  • Contact

?

Celui Qui Ne Connaît Pas L'histoire Est Condamné À La Revivre.